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Rencontre

TOUCHE « VINTAGE » d’une maison de ville bordelaise

Restée dans son jus, avec sa déco datée et ses toutes petites pièces, cette maison de ville renaît avec une décoration mixant contemporain et vintage.
Par Alexandra Fournier

Située à Bordeaux Nansouty, cette maison typique des années 1950 était restée dans son jus, avec sa déco datée et ses petites pièces. Nadine Durand, décoratrice d’intérieur MH DECO, a imaginé la rénovation, l’aménagement et la décoration de cet habitat de 120 m2. Le chantier a nécessité la transformation des trois pièces existantes du rez-de-chaussée en un seul espace de vie intégrant cuisine, salon, salle à manger, bureau et WC, ainsi que la refonte totale de l’étage avec ses trois chambres et sa salle de bains. Pour cela, la décoratrice d’intérieur a posé des IPN, un parquet en bois massif dans le séjour, un tapis de carrelage dans la cuisine, créé une verrière, repeint tous les murs et plafonds…

Un rez-de-chaussée à l’esprit industriel

La déco de la cuisine se caractérise par son association bois, noir et métal, joliment mise en valeur par une crédence d’un bleu profond. Dans le séjour, les IPN sont volontairement restés visibles. Peints en noir, ils font écho à la verrière dans un esprit industriel. Le mobilier associe des éléments contemporains à des pièces vintage, comme l’enfilade scandinave chinée ou le fauteuil de bergère style Napoléon III. Dans le bureau, qui a investi une petite pièce de 6 m2, la verrière créée sur-mesure apporte une sensation d’espace et le vert lichen posé sur les murs confère un caractère chaleureux au lieu, où le mobilier ancien soigneusement chiné côtoie une lampe sur pied de facture Art Déco.

Un étage métamorphosé

À l’étage, Nadine Durand a créé une salle de bains avec toilettes et remplacé l’intégralité des menuiseries. Côté déco, elle a conservé – pour mieux les exploiter – le parquet en points de Hongrie, le carrelage au sol, les plinthes en faïence, ainsi que la cage d’escalier avec son garde-corps. Sur le palier qui distribue toutes les pièces, elle a joué à fond la carte Art Déco, mettant en valeur le garde-corps galbé d’origine entourant la cage d’escalier, dans le cadre d’une composition associant une suspension globe en verre, une affiche publicitaire abribus Le Bon Marché et un meuble vitrine. Grâce au puits de jour de forme arrondie expressément réalisée, la lumière naturelle est présente dans cet espace. De dimensions plutôt modestes, la chambre parentale accueille un dressing intégré le long du mur. La pièce a été traitée dans des tons chauds de bleu, céladon et vert, en association avec des matières naturelles : lin, osier, bois. La commode familiale ancienne apporte une touche d’authenticité. Contemporaine
et vintage à la fois, la chambre d’enfant où la couleur bleue est très présente, accueille un petit bureau d’écolier chiné et une petite étagère scandinave. Dans la chambre d’amis, qui fait aussi office de salle de jeux, Nadine Durand a posé un lit banquette extensible pouvant accueillir deux personnes. La pièce a été décorée dans un esprit vintage, associant papier peint, armoire ancienne et matières naturelles et cosy. Enfin,
la salle de bains a été complètement rénovée. Dans un souci de modernité, l’ensemble de la robinetterie a été encastré. La déco en noir et blanc associe deux types de carrelages : à motifs géométriques pour habiller la douche à l’italienne et métro blanc pour les autres murs. Au sol, la décoratrice d’intérieur a opté pour un carrelage noir carré au style 60’s.

D’où vous vient votre passion pour la décoration ?

Depuis toujours, je suis sensible aux environnements intérieurs. Les aménagements, les choix décoratifs et de mobilier, le fait de ranger ou pas… sont très révélateurs de la personnalité et de l’individualité des occupants. Et je suis assez curieuse de cela. J’adore regarder chez les gens. J’aime qu’un lieu ait du caractère. Cela doit venir du fait qu’étant née dans les années 70, j’ai grandi au milieu de papier peint à fleurs marrons, canapé en velours côtelé, cuisine en formica, suspensions en osier… Ce n’est pas neutre comme environnement ! On en prenait plein les yeux, c’est le moins que l’on puisse dire. Quelque-part, cela a dû forger mon goût pour le vintage. Le cinéma aussi a été déterminant dans ce choix : j’aime les films où les intérieurs sont marqués et particulièrement travaillés comme dans Gatsby Le Magnifique, The Ghost Writer, Billy Elliot et, plus récemment, Parasite.

Quels sont les styles qui vous inspirent ?

Je suis issue du monde de la publicité et la série Mad Men a été pour moi une révélation incroyable. Une véritable mine d’or stylistique, tant pour les costumes que pour les décors. Je suis fan de l’univers proposé, directement inspiré des travaux des designers Knoll, Le Corbusier, Vitra, Eames, Jacobsen, Prouvé… On est dans les années 50 mais ce style reste véritablement intemporel.

Comment trouvez-vous l’inspiration pour chacun de vos projets ?

D’abord, c’est l’architecture même d’un lieu qui m’inspire et l’époque de sa construction, son âme, que je m’attache à conserver quand cela est possible, ce qui n’est pas toujours le cas. Malgré tout, il y a toujours des éléments auxquels se raccrocher : des matériaux, des couleurs, un environnement… Je m’attache d’abord à être cohérente avec cela pour proposer un intérieur en harmonie.

Intégrez-vous une dimension « durable » ?

Même si je n’en fais pas un axe stratégique, je suis consciente que cette dimension est fondamentale. Malheureusement, nous sommes d’abord guidés par la contrainte budgétaire et cela n’influence pas toujours nos choix dans le bon sens. Pour autant, dans la mesure du possible, je maximise les recherches de mobilier d’occasion, les matériaux respectueux de l’environnement, comme certaines marques de peinture, et l’origine locale ou nationale des produits.

Qu’est-ce qui vous guide généralement dans le choix des matières et des matériaux ?

J’ai une prédilection pour certains matériaux. Par exemple, comme je suis une fan absolue de papier peint, j’en conseille souvent à mes clients. D’autant que, le papier peint étant devenu tendance aujourd’hui, on a l’embarras du choix. Au delà de s’adapter à tous les styles, le papier peint est un matériau fabuleux qui permet de créer immédiatement un univers, de signifier les espaces, de donner une personnalité aux lieux.

Pour la rénovation de cette maison typique des années 1950, avez-vous conservé des éléments architecturaux d’époque ?

Évidemment ! J’ai notamment conservé l’escalier, central dans la maison car, malgré un encombrement important, son design est très particulier et intéressant : de forme presque hélicoïdale et tout blanc, il m’évoque l’architecture du Musée Guggenheim de New York. J’ai juste créé un puits de jour à l’aplomb de la cage d’escalier, permettant de la baigner de lumière naturelle. J’ai également conservé et remis à neuf les parquets en points de Hongrie dans les chambres ainsi que le carrelage et les plinthes en faïence noire sur le palier, un vestige des années 50 qui ne se fait plus du tout.

Quelles étaient les contraintes liées à l’architecture ?

La maison était clairement « dans son jus », avec des pièces de vie toutes petites et cloisonnées. J’ai très vite capté le potentiel de la maison, construite précisément à l’époque de mes styles de prédilection.

Créer un grand espace de vie au rez-de-chaussée est-il important ?

C’était primordial ! Avec trois pièces de vie et un couloir dans 40 m², la question ne s’est pas posée très longtemps. Il a fallu abattre toutes les cloisons, dont deux murs porteurs, d’où la nécessité d’installer des IPN (poutre en forme de I).

Au rez-de-chaussée comme à l’étage, vous avez choisi de mixer différents styles. Pourquoi ? Et quels sont les erreurs à ne pas commettre ?

C’est vrai, le parti-pris pour le rez-de-chaussée, complètement rénové et modernisé, a été de laisser apparents les IPN pour un style un peu « loft », alors qu’à l’étage, nous avons davantage conservé l’âme d’origine. Mais il n’est pas interdit de mixer les styles, au contraire ! Tout est question de dosage. La maison est ainsi de facture plutôt moderne, avec une touche de vintage. Et pour personnaliser les espaces, ne pas hésiter à oser aussi
certaines couleurs ou motifs… tant que cela reste mesuré.

Qu’est-ce qui fait désormais l’originalité du lieu ?

Son effet « whaouh » immédiat… lié à l’association du bleu nuit de la cuisine, assez inédit et peu commun, du bois et de la perspective offerte par la verrière ouvrant sur le jardin. La création de cette pièce de vie a été un choix audacieux et reste la réussite de la maison.